Ce qu’a rapporté l’Euro 2016 à la France

Quelles sont les retombées du championnat d’Europe de football pour la France ? Après les villes hôtes, c’est au tour du gouvernement de présenter son bilan économique de l’organisation de l’Euro 2016. Selon les chiffres publiés par le ministère des Sports, l’Euro 2016, qui a coûté officiellement moins de 200 millions d’euros à la France, a rapporté 1,22 milliard au pays. L’étude du Centre de droit et d’économie du sport (CDES) de Limoges avait tablé sur des retombées positives pour l’économie française situées entre 1,1 et 1,2 milliard d’euros. Ces résultats sont, selon Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, un signe encourageant pour la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2024.

Le gouvernement s’était engagé à faire évaluer de manière indépendante les retombées économiques de l’Euro 2016. Cette première étude, réalisée sous l’égide de l’Observatoire de l’Economie du Sport, en lien avec l’INSEE et la Direction générale du Trésor, laisse apparaître un impact financier de 625,8 millions d’euros pour le tourisme et de 596 millions d’euros pour le volet organisation soit 1.221,8 millions d’euros. Ces chiffres ont été obtenus après le traditionnel calcul de l’« effet d’éviction » qui prend en compte les dépenses touristiques non réalisées en raison de l’Euro. En ce qui concerne les retombées touristiques d’ailleurs, seules les dépenses des 613.000 spectateurs étrangers et des 34.000 « hospitalités » ont été prises en compte, excluant ainsi les spectateurs français. Parmi les touristes, 40.000 ont uniquement suivi les matches depuis les fan-zones, détaille ce bilan économique issu de l’étude conjointement menée par l’agence Keneo et le Centre de droit et d’économie du sport de Limoges (CDES). En moyenne, les visiteurs de l’Euro 2016 ont dépensé 154 euros par journée et sont restés 7,9 jours en France, dépensant donc un total de 625,8 millions d’euros. Sur cette somme, 35 % ont été consacrés au logement, 30 % à la restauration, 15 % aux transports et 20 % aux emplettes et visites.

L’Etat avait engagé 24 millions d’euros pour assurer la sécurité de la voie publique et en particulier des fan-zones en juin et juillet, soit le double de la somme initialement envisagée, en raison de la recrudescence du risque terroriste. Par ailleurs, 160 millions d’argent public avaient été investis dans la construction-rénovation des onze stades du tournoi entre 2011 et 2016. Le reste des dépenses avait été assumé par des fonds privés et par l’UEFA, organisatrice du tournoi.

9.762 emplois équivalent temps plein

Les retombées en matière d’organisation sont en majorité liées aux dépenses opérationnelles de l’UEFA, maître d’œuvre de la compétition (360 millions d’euros). Viennent ensuite celles des 24 équipes participantes contributrices à hauteur de 34,9 millions d’euros aux retombées du tournoi. Ce chiffre est peu ou prou celui dépensé (34,8 millions d’euros) par les personnes accréditées (journalistes, prestataires directs, etc.) alors que les sponsors n’ont déboursé que 22,6 millions d’euros.

Au total, l’organisation de l’Euro 2016 a représenté un accroissement de l’activité équivalent à 116.750 mois travaillés. Soit 9.762 emplois équivalent temps plein sur l’année 2016. Pour l’Etat, le championnat d’Europe a également eu des conséquences positives en terme fiscal, notamment grâce aux 70 millions d’euros de TVA encaissés. L’étude a évalué à 75 millions d’euros les recettes additionnelles générées par l’accueil de la compétition, soit 70 millions au titre de la TVA, 2,7 millions de taxe de séjour et 2,2 millions de taxes d’aéroport. Pour être juste, il convient de rappeler que l’UEFA a bénéficié de larges exonérations fiscales, portant notamment sur l’impôt sur les sociétés. En 2014, la commission des finances de l’Assemblée nationale avait estimé que ces exonérations fiscales représentaient un manque à gagner de 150 à 200 millions d’euros. Toutefois, l’exonération était une condition non négociable à l’obtention de la compétition. Ce « manque à gagner » ne peut donc exister qu’avec l’organisation de l’événement. Est-il juste de comparer les deux montants ? Si l’on raisonne exclusivement sur les recettes fiscales directes, la non-organisation de l’Euro était synonyme de 75 millions d’euros en moins dans les caisses de l’Etat.

Jean-Jacques Gouguet : On s’est planté

Ce chiffre de 1,22 milliard d’euros d’impact économique total est à comparer à celui de l’étude ex-ante menée par le CDES à la demande de l’UEFA en 2014. A l’époque, les auteurs tablaient sur un impact pour la France de 1,26 milliard. Les deux études sont donc concordantes pour ce qui est des grands équilibres. Toutefois, comme l’a reconnu Jean-Jacques Gouguet, directeur scientifique des études économiques du CDES, lors de la présentation, on s’est complètement planté sur l’étude ex-ante. En effet, précise l’économiste, si l’évaluation de l’injection par l’UEFA des dépenses d’organisation était juste, l’évaluation touristique a posé problème. A ce titre, Patrick Kanner, a admis que le nombre final de spectateurs des fans-zones était inférieur aux prévisions.

Au final, note le CDES, si l’impact économique peut apparaître conséquent en valeur absolue, il est relativement faible comparativement au produit intérieur brut annuel de la France. L’impact de l’Euro 2016 ne représente en effet que moins de 0,1% d’un PIB d’environ 2.200 milliards d’euros. Ce n’est donc pas sur cette base que l’on peut conclure à la légitimité des dépenses (publiques notamment) consenties pour l’accueil de la compétition, tranche le CDES. Pour arriver à une telle conclusion (ou non), il aurait fallu prendre en considération l’intégralité du cycle de vie de l’événement et en particulier mesurer l’héritage (sportif, social, territorial) laissé à la France et aux villes-hôtes.

La mesure de l’héritage figure parmi les recommandations finales de l’étude en vue des prochaines études d’impact de grands événements sportifs internationaux organisés en France. Cependant, à ce jour, aucune nouvelle étude n’est programmée pour les événements à venir ou en cours comme le Championnat du monde de handball…

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