Le Stade de France a quatre ans

On n’a pas vu le temps passer. Entre le 28 janvier 1998 (inauguration officielle lors de France-Espagne), la victoire en Coupe du Monde, les épreuves de Golden League, les concerts de Johnny Hallyday et le 28 janvier 2002, quatre ans se sont écoulés.

Depuis quatre ans, celui dont on aimait se moquer en mettant en relief ses initiales SDF est devenu le Stade de France, le stade qui fait gagner la France. Chaque année, 200.000 visiteurs se pressent dans l’enceinte pour visiter le lieu mythique. Avant, on venait pour savoir où Zinedine Zidane s’asseyait dans les vestiaires, maintenant le stade attire par son architecture comme peut le faire la basilique de Saint-Denis ou n’importe quel autre monument devenu historique.

La ville se félicite de cet équipement qui change petit à petit son image. En quatre ans, de nombreux commerces (cinémas, restaurants, hôtels…) se sont créés autour du stade. Des entreprises ont ouvert des bureaux (Canal + Multimédias, Leroy-Merlin). Le maire de Saint-Denis, Patrick Braouzeck, constate que le Stade de France est une locomotive. En 2001, 170 entreprises nouvelles se sont créées à Saint-Denis et ont généré un milliard d’euros d’investissement ! Sur cette même année, le chômage a baissé de 10 % dans la ville.

Le Consortium (Bouygues-SGE-Dumez) qui gère l’enceinte (la concession a été accordée jusqu’en 2025) se frotte également les mains. En quatre ans, le Stade de France a accueilli 77 manifestations et plus de cinq millions de spectateurs. Sur l’exercice 2000-2001 (juillet 2000-juin 2001), le chiffre d’affaires s’est établi à 64,8 millions d’euros pour un bénéfice d’un peu moins de quatre millions d’euros. Les recettes publicitaires représentent 20 % du CA contre 6 % pour l’organisation et la réception de congrès-séminaires (200 par an pour une recette de 4 millions d’euros).

Toujours pas de club résident

Cependant, quatre ans après son inauguration, le Stade de France n’a toujours pas de club résident et ne devrait jamais en avoir. Le Paris SG ayant choisi de rester au Parc des Princes, aucune formation parisienne ne paraît capable de réunir suffisamment de spectateurs pour rentabiliser les lieux. Les différents candidats (Racing, Red Star, Saint-Denis – Saint-Leu et Créteil) ont renoncé les uns après les autres et le Consortium ne paraît pas vraiment pressé d’en trouver un. Difficile pour lui en effet de mettre sur pied des opérations comme l’opéra Aïda de Verdi avec un club qui réquisitionne les installations pour une trentaine de matches par an. L’image du lieu changerait également. Aujourd’hui stade des équipes de France de football et de rugby, le lieu perdrait de son attrait si un club venait à s’y installer.

Difficile aussi de se passer des 10,67 millions d’euros versés par l’Etat pour compenser cette absence, même si les dirigeants du Consortium récusent cet argument. Pascal Simonin, nouveau directeur général du Consortium, précise que lorsque le Consortium fait mieux que les prévisions établies au moment de la signature de la concession en 1995, il partage à 50 % avec l’Etat. Ainsi, le Consortium reverserait cette année 4,5 millions d’euros en plus des impôts et des taxes diverses. Pourtant le Ministère de la Jeunesse et des Sports cherche toujours à réduire la facture. Marie-George Buffet a même demandé à Bercy de trouver une porte de sortie. Le Ministère et le Consortium ont bien entamé des négociations mais elles ne portent que sur des détails liés, entre autres, aux places de parking.

Autre motif de grogne, le coût d’utilisation. Ce n’est un secret pour personne, la Fédération Française de Rugby (FFR) préfère que le XV de France dispute ses rencontres au Stade Vélodrome plutôt qu’au Stade de France. La capacité de l’enceinte marseillaise est plus petite (60.000 sièges contre 80.000), mais sa rentabilité est meilleure. La FFR doit, contractuellement, faire disputer un minimum de 4 matches à Saint-Denis et reverser 35 % du prix du billet au-delà de 50.000 places vendues au Consortium ! La Fédération Française de Football (FFF), qui doit 5 rencontres annuelles au Consortium, souhaiterait, elle aussi, voir les prix baisser. La FFF constate qu’elle ne gagne pas plus d’argent à Saint-Denis que lorsque l’équipe de France jouait au Parc de Princes (45.000 places). Les recettes brutes sont supérieures (2 millions d’euros contre 1,2 millions d’euros) mais une fois déduits les frais d’organisation, le résultat est quasi-équivalent à celui du stade de la Porte de Saint Cloud.

Les 150 permanents du Stade de France ne se posent pas ce genre de question et travaillent déjà à la réussite des prochains championnats du monde d’athlétisme de 2003 et aux autres évènements envisagés comme un spectacle de cirque (mais il faut couvrir le stade), une corrida (sans mise à mort) ou une course hippique !
Le Stade de France en chiffres

Près de 400 millions d’euros : c’est le coût de la construction de ce stade, qui a duré 31 mois (de mai 1995 à novembre 1997). Le financement a été pris en charge pour 53 % par le privé et pour 47 % par l’Etat.

46 millions d’euros : il s’agit du chiffre d’affaires annuel prévisionnel du consortium constitué par Bouygues, SGE et Dumez, qui détiennent chacun un tiers des 22,87 millions d’euros de capital social.

10,6 millions d’euros : le Ministère de la Jeunesse et des Sports, qui a sous sa tutelle le Stade de France, doit verser tous les ans cette somme au consortium chargé de le gérer.

1.750.000 : chaque année, le Stade de France accueille 1,75 millions de spectateurs. Ils sont encadrés par les 2 000 vacataires qui interviennent lors des manifestations les plus importantes.

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