Le basket espagnol est en crise

FC Barcelone contre Real Madrid: la belle affiche de la demi-finale de l’Euroligue, vendredi à Londres, est une façade flatteuse qui masque la réalité d’un basket espagnol cruellement frappé par la crise économique.

A ne regarder que l’élite, le baloncesto ibérique semble dans une forme resplendissante. La sélection nationale, championne d’Europe, tutoie les Américains en finale des jeux Olympiques, des stars brillent dans les meilleures franchises de NBA et le pays a toujours qualifié au moins un de ses clubs au Final Four de l’Euroligue depuis neuf ans.

Dans le monde du basket, nous faisons partie du G4, s’est félicité récemment le président de la Fédération espagnole, José Luis Saez, qui s’apprête à organiser le Championnat du monde en 2014.

Mais derrière ces locomotives toujours flambantes, les wagons de la Liga ACB, le championnat national, ne suivent plus le rythme et certains ont même déjà décroché, confrontés au retrait des sponsors et à la diminution des droits télévisuels.

Des clubs comme Grenade ou Minorque, qui faisaient partie depuis longtemps du paysage sportif espagnol, ont mis la clé sous la porte à la fin de la saison dernière. L’équipe des Baléares venait de gagner sur le parquet son billet pour la première division.

Bilbao, lâché en pleine saison par son principal parraineur, a été ranimé in extremis par une injection d’argent du gouvernement provincial de Biscaye, l’année même où il atteignait la finale de l’Eurocoupe. Les Catalans de Manresa ont eux été contraints d’organiser une quête pour garder la tête hors de l’eau.

A part les deux géants, les enseignes les plus prestigieuses ne sont pas épargnées. Malaga, qui était encore au Final Four en 2007, a ainsi vu son budget passer de 18 millions d’euros à 8 millions en deux ans, selon le quotidien El Pais. Vitoria, quatre fois de suite dans le quatuor majeur de l’Euroligue de 2005 à 2008, est contraint de vendre ses meilleurs joueurs, dont l’Américain Brad Oleson, qu’on verra sous le maillot du Barça au Final Four.

Fuite des joueurs

La crise a accéléré l’exode des meilleurs joueurs vers la NBA, où se trouvent les principaux Espagnols (les Gasol, Calderon, Rubio, Ibaka) et un grand nombre d’étrangers qui ont un jour brillé en Liga ACB. Huit des dix derniers MVP du Championnat espagnol ont ainsi pris la direction des Etats-Unis. L’été dernier, sept des dix premiers au classement du MVP sont partis à l’étranger.

Aux étages inférieurs, la saison a été ponctuée de tristes feuilletons, des joueurs menaçant de faire grève avant de claquer la porte faute de recevoir leur salaire. Les Américains Othello Hunter et Tony Gaffney ont ainsi quitté Valladolid et Badalone en pleine saison.

Et la crise touche aussi de plein fouet le basket féminin. Ainsi l’équipe de Valence, lâchée par son sponsor historique, a disparu en 2012 quelques semaines après avoir gagné l’Euroligue et huit des douze Championnats d’Espagne précédents.

Le niveau moyen du Championnat espagnol, naguère considéré comme le meilleur d’Europe, s’abaisse et l’écart entre les deux clubs-phares, dont le budget dépasse 20 millions d’euros, et le reste du peloton paupérisé se creuse. Le Real Madrid peut ainsi se permettre de payer 2,5 millions par saison pour attirer l’ailier Rudy Fernandez, de retour de NBA, et Barcelone de débourser une somme équivalente pour retenir l’intérieur slovène Erazem Lorbek, tenté par les Etats-Unis, alors que ce montant correspond au budget total d’un club de bas de tableau, selon El Pais.

Dimanche à l’O2 Arena, Madrid ou Barcelone apporteront peut-être à l’Espagne son douzième titre européen, à une unité du record détenu par l’Italie, mais le basket espagnol n’en sera pas tiré d’affaires pour autant.

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