Tournoi olympique : la mise au point de l’Europe

Gary Payton en détresse et CQF en pleine forme : un article très long, pour les mordus de l’analyse tactico-psychologique. Mais où sont passés les Américains ?

Au début, ce tournoi olympique s’annonçait comme les autres. Malgré quelques défections (O’Neal, Grant Hill, Kobe Bryant, et Tim Duncan, mais aussi celle arrangeante de Tom Gugliotta) toute la presse annonçait une médaille d’or, d’ores et déjà acquise aux Etats-Unis. Seuls quelques spécialistes faisaient remarquer la présence d’un seul vrai pivot dans l’effectif (Mourning). Mais pour le reste, personne ne pensait vraiment voir, pour la première fois de l’histoire, une équipe composée de professionnels de la NBA défaite, ou même mise en danger, si ce n’est par la Yougoslavie, dans un jour d’euphorie totale.

Au final, ce ne sera pas la Yougoslavie éliminée en quarts de finale, mais des modestes équipes russe, lituanienne, et française qui auront fait trembler l’édifice de suffisances et de certitudes de l’équipe US.

Sûrs de leur supériorité, les Américains se sont présentés au tournoi olympique avec une préparation minimum de trois semaines et seulement cinq matches dans les jambes. Là où la dream team de Barcelone avait fait merveille par sa cohésion, le jeu collectif de l’équipe américaine de Sydney a été totalement absent. Peu de jeu de passes, un ryhtme lent, quasiment dépouillé de systèmes, et le coach le plus arrogant de la planète basket vis-à-vis de l’Europe pour encadrer le tout. En effet, avant ces Jeux, Rudy T. ne déclarait-il pas les Etats-Unis intouchables et ce pour encore plusieurs décennies. Entre la dream team de 92 et les JO de Sydney, c’est 8 ans qu’il aura fallu attendre pour voir les Américains plus qu’inquiétés.

Car si ils n’ont pas perdu (l’honneur est sauf), la première alerte est venue rapidement avec une victoire difficile de seulement 10 points face à la Lituanie. Devant le jeu collectif parfaitement huilé de ceux-ci, les américains se sont montrés brouillons, nerveux, et maladroits, révélant en cela l’inexpérience de certains de leurs sélectionnés. Rappelons en effet qu’aucun joueur de cette équipe américaine n’a gagné de titre NBA. Face aux trois titres de Jordan, les cinq de « Magic » Jonhson, et les quatre de Larry Bird, cela fait peu…

Et l’on touche là à la première des faiblesses et non la moindre de cette dream team 4 : l’Aura. La première dream team méritait son appellation tant la composition de l’effectif évoquait une armada de légendes du jeu. Peu à peu, les effectifs des Teams USA se sont affaiblis en qualité et aussi surtout en terme d’admiration qu’elles pouvaient provoquer chez leurs adversaires. Aujourd’hui, ces adversaires ne viennent plus demander des orthographes avant les matches à leurs adversaires. Ils ne rêvent plus maintenant de se faire photographier sur le terrain en train de défendre sur un jeune all-star prétentieux et chambreur…

Car malgré tout le talent présent dans ces équipes, en termes de génie et surtout de classe, Vince Carter va haut mais n’est pas Jordan, Garnett parle beaucoup mais n’est pas Barkley, Tim Hardaway reste un bon passeur mais n’est pas John Stockton, Ray Allen est un joueur élégant, mais il n’est pas Clyde Drexler…
Les premières équipes pro NBA inspiraient crainte et fascination. Les dernières dream team n’évoquent plus que respect et spectacle.

Reprenons le fil de la compétition.

Premiers signes d’inquiétudes donc face à la Lituanie mais même face à la Chine qui tient bon 25-30 min avant de céder (aussi en raison d’un coaching catastrophique de l’entraîneur chinois…). Les écarts de points se réduisent donc et, surtout, l’attitude des joueurs sur le terrain a changé : on ne vient plus pour perdre, on vient pour jouer, voir pour gagner.
Cette image écorchée, débouchera sur cette autre victoire difficile face à la Russie en quarts, et sur cette victoire de deux points à la dernière seconde dans cette partie d’anthologie face à ces mêmes lituaniens, avec tir à trois points « at the buzzer » qui frôle avec le filet et avec l’Histoire.

« La Lituanie frôle de défaire les Etats-Unis » : une nouvelle qui fait tâche aux pays des hamburgers, surtout qu’aucun journaliste là-bas n’est capable de situer ce microscopique pays sur une carte. La Lituanie et ses dérisoires 2000 licenciés de basket face aux millions de pratiquants américains… Et encore les américains ne savent pas que cette province de l’ex-URSS est privée de ces trois plus grandes stars pour ces jeux : Arvidas Sabonis (NBA), Zulgauskas (NBA) et Karnishovas. Trois joueurs logiquement dans les cinq majeurs lituanien, trois sur cinq…

Une autre équipe se libère et frôle le gigantesque : la France (cocoricoo !!). Après avoir mené de 12 points, la France est rejointe et dépassée, mais ne s’incline au total que de douze points dans son match de tour préliminaire.
On connaît la suite et cette finale perdue de dix points (record du plus petit écart dans une finale olympique comprenant les USA) et surtout l’écart de quatre points à 4 min de la fin du match (La France a compté jusqu’à 16 unités de retard).

Les mentalités ont changé aussi côté américains. Avant même cette finale, le très confiant Rudy T. se montre un rien prudent. Il annonce qu’il faudra se méfier des Français et jouer le coup à fond. Une phrase impensable il y encore trois semaines, et un résultat qu’il l’aurait été tout autant.

Et encore, les américains ne savent pas que dans cette équipe française, outre les blessures de Sonko et de Bonato (deuxième meilleur marqueur de l’équipe), ils manquait nos deux joueurs NBA : Abdul-Wahad et Moïso.

La France a gagné une médaille d’argent historique à Sydney. Elle restera aussi dans l’histoire pour avoir montré la voie aux équipes du reste du monde, pour réussir à battre enfin un jour, le pays du basket.

C.Q.F.

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