La Golden League n’est plus vraiment d’or

Roi incontesté des Jeux Olympiques, l’athlétisme déprime entre deux olympiades. Cette saison, les dieux du stade doivent faire face à la crise. Comment relancer un sport en perte de vitesse ?

Il y a des signes qui ne trompent pas. L’athlétisme de haut niveau cherche un second souffle. La réunion de Berlin n’existe encore que par l’intervention d’un généreux mécène qui a réglé les 350.000 euros de passif après le dépôt le bilan des organisateurs. Le stade olympique de Rome sonne désespérément creux lorsque la Golden League fait étape dans la Cité Eternelle et Oslo ne dispose plus des infrastructures nécessaires pour accueillir les pointes des meilleurs athlètes mondiaux. Pour noircir un peu plus le tableau on pourrait également citer le cas du meeting d’Athènes en grande difficulté financière depuis que son principal bailleur de fonds, le milliardaire Minos Kiryakou, bat de l’aile.

C’est grave docteur ?

Plutôt oui. L’été dernier Marion Jones et Maurice Greene, les superstars de la piste, étaient venus à Paris contre un cachet de 100.000 dollars chacun. Cette année, les deux Américains se présenteront au Stade de France pour 75.000 dollars seulement ! L’heure n’est plus à pleurer sur son sort mais à trouver des solutions. Le continent européen représente le seul marché tangible de l’athlétisme. Ses meetings en danger, c’est le sport tout entier qui est remis en cause. Emanuel Hudson (le H de HSI), manager de Maurice Greene, est parfaitement conscient de la situation : Nous savons très bien que notre marché principal, pour ne pas dire exclusif, se trouve en Europe. Oui mais l’Europe est malade. Malade de sa situation économique qui oblige les sponsors à couper leurs investissements publicitaires et donc les télévisions à revoir leurs grilles des programmes. Pour la première fois depuis sa création (1984), Canal + ne diffusera pas d’athlétisme cette saison.

La faute à qui ?

Le football est souvent cité pour expliquer le manque de couverture médiatique dont souffre l’athlétisme (167 heures de diffusion en 2001 pour le football contre 80 heures pour l’athlétisme, année des championnats du monde d’Edmonton). Mais il faut aussi noter le coût de production des meetings, jugé trop cher : 230.000 euros de frais de production par meeting selon Frédéric Chevit, directeur des sports de France Télévision, soit deux fois plus qu’un match de football. Derrière le paravent idéal que constitue le football, il y a également des causes qui sont propres à l’athlétisme. Le sport ne fait pas rêver. Dans l’étude 2001 de Carat Sport sur L’image des sports, l’athlétisme est noté 7,7/10 sur la valeur Plaisir. C’est-à-dire en dessous de la moyenne des 41 sports étudiés qui est de 8,4/10. Pour la première fois depuis 14 ans, le nombre de licenciés à la Fédération française d’athlétisme est en baisse : 174.743 en 2001 contre 178.843 en 2000. L’athlétisme n’attire plus les jeunes qui se tournent vers d’autres sports.

Les athlètes sont aussi responsables de cette désaffection du public (la réunion de Saint-Denis n’attend que 55.000-56.000 spectateurs dont un bon tiers d’invitations gratuites). Maurice Greene n’a pas vraiment l’aura d’un Carl Lewis. De plus, les athlètes restent réfractaires aux changements de règlements, tels que l’interdiction du faux départ en sprint, ou la réduction de six à quatre du nombre d’essais pour les lancers. Il ne faut pas oublier le rôle des instances dirigeantes. Depuis le lancement de la Golden League, les règlements ont plusieurs fois été modifiés. La formule de la Golden League a changé quatre fois en cinq ans ! Cette année, il faut remporter les sept étapes pour prétendre aux 50 kilos d’or (contre un million de dollars en 1998 et 1999) alors qu’en 2000 et 2001, cinq victoires étaient exigées.

Les solutions

La Fédération internationale d’athlétisme (IAAF) envisage de réduire de sept à cinq (ou six) le nombre de meetings estampillés Golden League. L’objectif affiché est de réussir à vendre en bloc les droits de retransmission d’une Golden League plus attractive. Des garanties financières sont désormais exigées. Chaque organisateur doit présenter un budget minimal (2 millions d’euros, dont la moitié pour les athlètes) et de solides garanties bancaires. Il doit trouver une chaîne de télévision qui retransmettra sa propre réunion (en direct), mais aussi les autres épreuves du circuit (quitte à ce que ce soit en différé). Mauvaise nouvelle pour l’IAAF, l’Union européenne de radio-télévision (UER) n’est plus candidate à l’achat des droits télévisés… Heureusement en 2003, il y aura les championnats du monde à Paris, et dans deux ans les Jeux Olympiques d’Athènes.

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